Paris Basmati

Des nouvelles de la Ville Lumière?

dimanche, juillet 30, 2006

Fuir le bonheur de peur qu'il ne se sauve


Je suis retournée à Paris. Je suis revenue. J'ai ri avec un inconnu dans le RER, j'ai sué comme une fontaine, j'ai marché jusqu'à plus soif (ou plutôt si, jusqu'à très, très, très soif) le nez en l'air pour être sûre de ne rien rater. J'ai revu des gens, là-bas, ici, j'ai retrouvé mes villes, ici, là-bas, et j'ai appris à les aimer, toutes les deux, vraiment. J'ai parlé de mon avenir en buvant de la bière. J'ai écrit ma pièce de théâtre. J'ai beaucoup, beaucoup, beaucoup souri. Et, pendant tout ce temps, il m'est arrivé souvent de penser ce que j'ai décidé de vous écrire aujourd'hui, de manière très maladroite, car il s'agit d'un cri du coeur et que ce genre de choses, ça ne s'écrit pas vraiment. Ca se vit. C'est d'ailleurs sur cet hymne au bonheur, que je vous souhaite à tous, que je vais fermer ce blog, je pense. Il m'a fallu un mois pour m'y résoudre mais je suis prête, à présent... Un autre s'ouvrira certainement. Pour l'instant, je ne sais pas... Pour l'instant... Je souris.

Il y a quelques années, je me souviens, Laurent Voulzy accompagnait la sortie de son album d'une déclaration qui m'avait fait forte impression. En gros, ça disait : "Je vais bien"…

D'habitude, je dois l'avouer: j'ai un léger problème avec le bonheur. Le mien comme celui des autres. Le mien parce qu'en bonne occidentale judéocapitalistochrétienne, j'ai toujours la sensation qu'il faut travailler pour le bonheur, que ça se paye, à tous les coups, et que trop de bonheur tue le bonheur. Celui des autres pour son arrogance crasse (parfois)…

Peut-être est-ce parce que j'ai eu la chance de vivre à bonne distance du malheur, le vrai, le noir, que j'ai toute ma vie cultivé une sorte de mélancolie créatrice ? Je ne sais pas… Toujours est-il que le bonheur et moi, on a souvent été voisins. Rarement amants... Ca ne m'avait pas empêché, cependant, d'aimer la déclaration simple et dénuée d’arrogance dont nous gratifiait Voulzy, à l’époque. Il était heureux et avait envie de le dire, sans écraser personne. Ca ne semblait pas si difficile, finalement...

Aujourd’hui, je crois que c’est mon tour… J’ai eu d’autres occasions dans le passé. Mais rarement ce sentiment de plénitude n’a duré comme maintenant. Alors, j’ai décidé d’en profiter pour une fois. Sans culpabilité. Sans nostalgie. Sans angoisse d’avenir. Juste ici, maintenant…

Je vais bien!

jeudi, juillet 20, 2006

Il paraît bien loin l'été Je ne l'ai pas oublié Mais j'ai perdu la raison


A la seconde où j'ai posé le pied sur le quai, je l'ai senti... Que j'étais loin de Paris, de Bruxelles, de tout. L'air humide de la côte qui vous carresse la joue et le vent qui décoiffe, c'est une sensation merveilleuse. A chaque fois...

Le groupe s'est reformé en chemin: j'ai croisé C. à la sortie du wagon, M. qui achetait un billet de tram, puis, Sa. et K. dans les rues de Wenduine. Ils n'ont pas beaucoup changé, en deux semaines: de nouvelles lunettes par-ci, quelques cheveux en moins par-là et des degrés de bronzage plus ou moins avancés. Rien de très impressionnant... Ils n'ont pas beaucoup changé mais, quand même, il faut prendre la peine de regarder leurs yeux. Il faut les voir briller un peu plus fort ou se couvrir d'un léger voile de nostalgie, par moments. Il faut se souvenir avec eux et rire, pour comprendre qu'en fait, si, ils ont changé. Ils ont changé comme moi. Ils ont quitté Paris.

Les retrouvailles autour du barbecue ont été d'une facilité surprenante. J'avais un peu peur, avant de partir, je crois... Peur de cette langue, qui n'est pas la mienne, et de ce groupe, qui n'a jamais vraiment été le mien non plus. Mais, dès les premières embrassades, j'ai oublié toutes mes appréhensions. Deux bises. Comme là-bas. C'est dingue comme ça m'avait manqué!

On a eu le choix entre Stella et Maes. On a tous pris Stella... Ca avait un goût de Paris. On a parlé de Bruxelles, beaucoup, et de Moray, un peu. Puis, il y a eu la nuit, les énigmes en Flamand et nos pieds dans les vagues. Et le lendemain, mes cheveux impossibles à coiffer. Et le soleil. Et la plage. Et eux.
Surtout eux...

Dans le train du retour, j'avais perdu tout repère linguistique. Une anglophone m'a posé une question à propos d'une gare et j'ai répondu en Italien ("si").

J'avais peur que tout soit différent, après Paris, et, ce week-end, ça l'était, assurément (il parlaient moins Français...) mais par "différent", je crois que j'entendais "moins bien".
Et en fait, non...

mardi, juillet 11, 2006

Nuit d'été


"T'as eu un mec, là-bas?"
J'ai repris une gorgée de bière en regardant la nuit tomber sur les étangs d'Ixelles. J'ai hésité. J'aurais aimé lui répondre que oui. Mais j'ai été honnête. Non, je n'ai pas eu de mec.
J'ai évité son regard parce que je savais qu'au fond, elle pensait, "comme d'hab" et qu'elle avait raison. Mais tout de suite après, comme pour me rattraper, je me suis entendue déclarer que j'avais eu pas mal d'occasions. "Et tu les as toutes refusées?" Il y avait comme une pointe d'incompréhension dans cette question. Je me suis dit qu'il faudrait que j'apprenne, un jour, à trouver des mots qui soient en accord avec mes pensées, quand je parle. Et accepter de m'épancher sur l'épaule des copains, aussi, ça me ferait pas de mal, des fois... Une voix en moi a soufflé que si je ne racontais rien, c'était parce qu'il ne se passait strictement rien dans ma vie sentimentale mais une autre s'est révoltée contre cette idée. Pas vrai! Il m'est arrivé plein de trucs à Paris! J'ai arraché une poignée d'herbe et j'ai répondu à E. que c'était pas exactement des occasions, en fait, juste des ambiguïtés, des impressions et quelques prétendants, peut-être. Que c'était fun. Mais que je n'étais pas tombée amoureuse. Elle a aquiescé en regardant ses pieds et on a changé de sujet. Au moins, elle, elle me pose encore des questions sur ce thème. Elle n'a pas démissionné. Elle connaît les réponses à l'avance mais fait l'effort de me faire croire que non. J'apprécie...
Dans les chroniques de San Fransisco, il y a une fille qui affirme qu'elle peut très bien se passer de mec tant qu'elle a cinq bons amis sur qui compter. Elle est un peu dépitée, je crois. Mais elle n'a pas tort. Moi aussi, je peux... Y a juste que socialement, j'aimerais pouvoir varier mes réponses quand on me pose ce genre de questions. Sinon, j'ai peur que les gens finissent par vraiment se lasser...

Nuit bleutée


En sortant du métro, dimanche soir, j'ai essayé d'ouvrir les portes alors qu'il roulait encore. C'est typiquement parisien, ça... Va falloir que je perde ces automatismes si je veux arrêter d'avoir l'air stupide. A Bruxelles, on ne se jette pas des trains en marche.

Sur le quai, j'ai vu une flaque bleue, puis, une autre. C'est malin de faire une finale France-Italie. Même les supporters ont du mal à se reconnaître entre eux! J'en ai vu plisser des yeux de myopes avant de déclarer: "Françaises! On va les massacrer." C'est comme ça que j'ai compris qu'eux, c'étaient des Italiens (oui... mes yeux aussi sont myopes).

Plus tard, au pub, les Français lançaient des "Allez les Bleus!" qui avaient le mérite de satisfaire tout le monde tandis que, de mon côté, je redécouvrais la joie d'être à Bruxelles. La vraie joie, je veux dire. Celle qui m'avait déjà saisie quelques fois ces derniers jours mais de manière très éphémère, toujours entourée de blues, et qui, brusquement, se remettait à couler dans mes veines au son des "hourras" et des cris de déception. C'est bien d'être dans une ville "neutre", une ville où on nous demande en Anglais si on supporte la France et où on peut se permettre de répondre, horrifiés, que non, bien sûr, on est pour l'Italie, une ville où la Jupiler coule à flots, même dans les pubs anglais.

C'est marrant, j'ai un peu la sensation d'avoir été dédoublée, ces derniers temps: deux villes de coeur, deux groupes d'amis... Deux vies. Infidèle, quoi que je fasse. Volage.

Mais heureuse.

vendredi, juillet 07, 2006

Et je n'ai pas regretté d'avoir osé oser près du pont Mirabeau un soir au bord de l'eau


Depuis vendredi, la vie s'est écoulée étrangement, comme fondue dans une émotion indéfinissable: une joie molle, teintée d'amertume. J'ai sorti toutes mes affaires de leurs sacs et entrepris de leur retrouver une place dans ma chambre. Ca m'a pris une semaine...

Je n'avais pas prévu ça. Rien de tout ça... Je me revois il y a un an, un an et demi, en proie à d'incessants questionnements d'avenir. Et je me souviens de ce soir de marsavril (non, ce n’est pas une faute de frappe, "marsavril" est un concept à part entière, auquel je tiens : le moment où tout s’éclaire) où la solution m'est apparue par sms. A moins que ce ne soit par mail? D. était assez excitée par ce qu'elle m'annonçait. Moi, je trouvais ça plutôt perturbant... Ainsi, il me serait encore possible de faire le master en un an, à partir de septembre? Tout en partant en erasmus? J'étais persuadée, à ce moment, d'avoir trouvé ma voie pour l'année qui s'annonçait. J'allais me noyer dans les stages, multiplier les expériences professionnelles, assister Benoît Mariage sur son prochain film. J'allais devenir quelqu'un! Ou rien... Traîner mon angoisse existentielle sur les bancs du chômage. Ce soir-là, tous ces beaux projets ont été pulvérisés en trois secondes. Par la force d'un sms. Ou d'un mail?

Paris, Paris, Paris... J'allais vivre là-bas! Enfin! J'aurais pu partir à Séville aussi. J'y ai même sérieusement songé à un moment. Mais Séville serait la ville des problèmes linguistiques alors que Paris était la ville du coeur. On m'a souvent demandé pourquoi j'avais choisi une ville francophone. Je n'ai jamais pu fournir de réponse correcte sur ce point. J'ai dit que j'avais peur. De la langue. Et c'était vrai. Mais je crois que j'ai surtout voulu suivre mon coeur...

Les derniers mois de 2005 se sont écoulés à un rythme effréné et ensuite, plus rien ne s'est passé comme je l'avais prévu. J'avais pensé vivre à Paris un isolement plus grand qu'à Bruxelles. J'allais être la petite provinciale perdue dans la métropole sans âme. Et il m'excitait, cet isolement. J'allais souffrir (un peu) et écrire (beaucoup)! Ce serait bien! J'avais pensé recevoir un nouveau trousseau de clés, aussi. Trousseau de clés que je trouvais éminemment littéraire (je me voyais déjà écrire: "j'ai deux trousseaux de clés, à présent...", savourant l'infinité de possibilités cachée dans ce simple enchaînement de mots) et que, pour cette raison, je fantasmais depuis des semaines. Mais pour ouvrir les multiples portes qui séparaient ma chambre à la maison des Belges de la violence du monde extérieur, je n'ai eu droit qu'à une carte. Carte que j'ai maintes fois oubliée, perdue, démagnétisée, injuriée, honnie. Carte qui me manque un peu, à présent... (allez comprendre) Quant à mon isolement, il a été peuplé comme jamais. D'ombres, de silhouettes, de figurants mais aussi d'acteurs. De vrais acteurs. Le genre qu'on n'oublie pas quand le film se termine et auquel on repense, des années plus tard, avec encore cette pointe d'émotion extraordinaire qu'ils nous ont procurée dès leur apparition à l'écran. Je n'ai rien écrit. Ce blog, quelques lettres et un travail de 15 pages. Rien d'autre. Mais j'ai emmagasiné de la matière pour écrire toute ma vie. Si je veux.
Si je peux...

Je n'avais pas prévu ça. Rien de tout ça. Mais je crois que pour la première fois de ma vie, mes rêves, pourtant fous et foisonnants, étaient en deçà de la réalité.
Alors, je me dis que c'est normal, d'être un peu sonnée, après ça...
C'est normal...
Et ça passera...
Ma chambre est déjà presque rangée, là.
C'est un bon début...